La dissection continue de soulever la polémique
12.04.10
Cest le cas de le dire…
La dissection continue de soulever la polémique
Traduction du texte original
Lundi 05 avril 2010, New Delhi
Après les écoles, les animaux pourraient bientôt ne plus se retrouver sur les tables de dissection des universités et des lycées si des militants de la cause animale emmenés par l’association PETA poursuivent leur campagne. En effet, suite à cette campagne contre la vivisection, 15 universités ont déjà décidé d’éliminer complètement ou de « réduire au minimum » les dissections d’animaux. Cinq d’entre elles y sont parvenues au cours des six derniers mois. Cependant, cette évolution a rendu la communauté scientifique perplexe quant à l’avenir de la recherche zoologique et de l’expérimentation sans dissection. Elle a donc incité la Commission de l’Université chargée des bourses (UGC) à créer un comité chargé d’évaluer les avantages et les inconvénients des dissections d’animaux dans les lycées et les facultés.
Le comité a cherché des réponses au problème auprès de toutes les facultés, mais cette tendance a soulevé l’inquiétude des pédagogues, la situation rappelant les années 1990, lorsque des défenseurs des animaux avaient porté le problème devant la Haute Cour de Delhi, laquelle avait alors ordonné que les dissections seraient facultatives dans le secondaire supérieur. En 2004, le conseil CBSE chargé des collèges bannissait les dissections d’animaux dans les écoles et plusieurs conseils d’établissement lui emboîtaient alors le pas.
S. Brahmachari, Directeur général du Conseil de la recherche scientifique et industrielle (CSIR), estime que cela peut avoir des conséquences dramatiques. « Pour les enfants qui s’intéressent à la science, il est important de voir certaines choses et de les ressentir. Je me souviens encore de la dissection d’une crevette et de son système nerveux lorsque j’étais à l’école. C’est le plus intéressant des systèmes nerveux. Des expériences très inoffensives peuvent être menées sans utiliser des animaux plus gros comme sujets. N’oubliez pas qu’un médecin ne peut pratiquer tout de suite des dissections humaines », déclare S. Brahmachari.
La commission UGC formée cette année à la demande du Ministre HRD Kapil Sibal a jusqu’ici tenu deux réunions. Composée de cinq membres, cette commission est présidée par H. A. Ranganath, vice-chancelier de l’Université de Bangalore, et comprend : S. Balasubramanian, directeur du Centre DRDO pour les Sciences de la Vie à l’Université de Bharathiar à Coimbatore ; Sunil Chhumber de AIIMS ; Roop Lal, du Département de Zoologie de l’Université de Delhi ; et un membre de la direction générale du CSIR.
Le ministre Sibal lui-même estime que « lorsque la science l’exige, les dissections d’animaux devraient être autorisées. Cependant, elles doivent être réduites au minimum et cette question doit être abordée avec sensibilité. »
Ce qui a inquiété les experts, c’est la tendance à la suppression totale des dissections, comme à l’Université de Bharathiar. « Suite à notre rencontre avec les environnementalistes, nous avons temporairement stoppé toute les dissections animales au profit de toutes sortes d’applications RTI (« réponse à l intervention ») ». Nous avons révisé le programme et remplacé les dissections d’animaux par des modèles informatiques pour les cours de licence et de maîtrise de zoologie », explique le Dr C. Swaminathan, vice-chancelier de l’Université de Bharathiar.
Le Département des Sciences de la Vie de l’Université de Delhi est aux antipodes de cette approche et se demande comment un étudiant en biologie pourrait s’abstenir de pratiquer la dissection animale depuis le début des études jusqu’à la maîtrise. « Vous ne pouvez pas pratiquer la chirurgie virtuellement ou sur le papier. Il faut trouver un équilibre rationnel. Supprimer les dissections n’est pas la réponse parce que tout ne peut pas être virtuel. Un étudiant doit être en mesure de s’habituer à pratiquer une dissection, à apprécier la profondeur du corps qu’il dissèque. Ceci ne peut pas être remplacé par des méthodes virtuelles », déclare un professeur.
En outre, ce même professeur note que « les médecins indiens sont très demandés dans le monde en raison de leurs compétences en matière de procédures chirurgicales, des compétences qui ne peuvent être acquises sans beaucoup de pratique. Bannir les dissections peut affecter ces compétences. »
Alors que plusieurs pays du monde développé ont déjà supprimé les dissections, les universitaires soulignent également l’écart profond qui existe entre la recherche et les laboratoires disponibles dans ces nations et dans les pays en voie de développement tels que l’Inde.
Professeur en immunologie à l’Ecole des Sciences de la Vie au JNU de Delhi, Rajiv Saxena se demande pourquoi la vivisection est une telle source d’émoi alors que la consommation de chair animale par les humains est largement acceptée.
Alors que les opposants à la vivisection soulèvent le problème de notre traitement des animaux, le Conseil Médical Indien, le Conseil Pharmaceutique Indien et le Comité pour la Supervision et le Contrôle des Expériences sur les Animaux rappellent aux établissements qu’il est important de garder cela à l’esprit, même lorsque les dissections seraient réduites au minimum. « Il est extrêmement important de se soucier du bien-être des animaux », déclare le Dr Sunil Chhumber, médecin doyen de AIIMS et membre de la Commission UGC sur les dissections. « Cependant, il ne faut pas oublier que les progrès de la science reposent en partie sur l’expérimentation. C’est notamment grâce à cette formation que nous avons de bons médecins en Inde. L’expérimentation doit être l’une des composantes même lorsque d’autres modèles tels que des alternatives audiovisuelles sont disponibles. Il n’est pas nécessaire que chaque étudiant dissèque un animal. La dissection devra être réalisée par l’enseignant ainsi que par quelques étudiants dans chaque classe. Au niveau Licence ou Maîtrise, il n’est pas possible d’éliminer complètement les dissections parce qu’une partie de ces étudiants suivront un cursus de recherche avancée et auront besoin d’être confrontés à la dissection. »
Les expériences sur l’animal sont également considérées comme vitales pour les tests de médicaments, le développement des vaccins et les études en immunologie. Alors que la plupart des scientifiques s’accordent à reconnaître que les expériences in vitro et basées sur les cellules peuvent dans une large mesure remplacer l’expérimentation animale, cette dernière ne saurait être complètement éliminée. Une voie médiane peut être trouvée, suggèrent certains, en limitant la dissection aux formes de vie animale les moins développées.
L’éminent scientifique Madhav Gadgil estime que la dissection des rats et des cafards ne devrait pas être interdite. « Dans l’enseignement général de la biologie, des dissections à répétition ne sont pas nécessaires. Et réduire les dissections aux cafards et aux rats, lesquels ne sont menacés d’aucune façon, devrait être autorisé », déclare-t-il.